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2 mars 2008 7 02 /03 /mars /2008 11:55
LE THÉORÈME JOUXTÉLIEN DE PROPAGATION DES FORMES

Énoncé :

a) Toute forme connaissable capable d'influencer les comportements de façon perceptible et répétée se propage spontanément en générant, de proche en proche des manifestations apparentées mais non nécessairement identiques.
b) La propagation d'une forme s'opère en utilisant d'une façon croissante les ressources disponibles en temps, espace et énergie, et se prolonge tant que ladite forme trouve des ressources à utiliser.
c) Le temps utilisé par une forme est la somme des temps vécus par ceux chez qui cette forme est perceptible, entre une limite initiale et une limite finale.
d) L'espace utilisé par une forme à un instant donné est la somme des portions d'espace affectées simultanément par * cette forme, y compris les portions d'espace où cette forme est perceptible.
e) L'énergie utilisée par une forme est égale à la quantité totale d'énergie transformée par les participants au cours des expériences vécues pendant lesquelles cette forme est perceptible.


Quand les formes connaissables influencent les comportements de façon assez régulière pour entretenir un observable culturel, on peut les appeler "mèmes". Leur lot permanent est la rivalité.
Pascal JOUXTEL in "Comment les Systèmes pondent" p. 245-246

Je propose d'essayer de procéder à la vérification de ce théorème pour deux mèmes observables un peu partout dans l'univers francophone de la mémétique.
L'un est assez récent. Il s'agit du mème des hommes de paille qui sont au même titre que les hommes sandwiches des supports de messages à usage informatif.
Le second est plus ancien. C'est le mème de la culture des pommiers, en relation avec la fabrication du cidre et avec les diverses technologies qui en découlent.

Le culturème pommier-pommages-cidre

Je ne parlerai pas de Calvados car ce dernier mème, qui se reproduit fort bien n'est qu'une conséquence du premier...

À propos de l'ancienneté de la présence des pommiers en Normandie, une conversation s'engage à l'université.
L'un croit que les pommiers se sont implantés en Normandie après que les chevaliers les aient rapportés des croisades.
L'autre affirme que c'est Charles II de Navarre dit Charles le Mauvais qui a apporté ces arbres fruitiers en les faisant venir de Navarre.
Vérifications faites, les deux explications ne sont pas ineptes et peut-être complémentaires mais la présence du pommier sur la terre normande n'a pas attendu ces deux opportunités.
En effet le mème de la culture des pommiers vient de très loin...


La forme homme de paille

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a) Il est incontestable que cet homme de paille est une forme connaissable
qui a pour but d'influencer les comportements (des automobilistes notamment), de façon perceptible et renouvelée. Il est aussi remarquable qu'elle se propage dans les cantons, dans les pays de tradition, de région en région avec des variantes parfois intéressantes et toujours créatives.

b)  La propagation de cette forme a eu lieu depuis un certain nombre d'années en développant - en détournant dirais-je - l'utilisation des ressources nouvelles de la technologie agricole récente et en particulier celle qui permet d'obtenir - grâce aux presses à foin et à paille "haute densité" - des balles rondes (round bales) et des balles parallélépédiques de très grand format transportables aisément grâce aux fourches hydrauliques des nouveaux tracteurs. Les ressources en la matière sont inépuisables puisqu'une douzaine de ces objets imposants ne représentent quasiment rien pour une exploitation, d'autant qu'elles seront réutilisables dans leur fonction initiale après qu'elles auront achevé de remplir leur mission de support d'information.

c) Le temps utilisé par une forme est fonction des besoins exprimés par les créateurs et se situe dans une zone de quelques semaines avant l'événement que l'homme de paille est chargé de présenter aux usagers de la route. Il y a en effet une date de départ optimale et la date limite finale est celle de l'événement annoncé lui-même.

d) L'espace dont cette forme a besoin pour remplir sa fonction, dans chaque cas précis de ses réplications locales est déterminé par sa wisibilité de la route ou voie de circulation où il est installé. Sa taille a donc de l'importance ainsi que celle des messages dont il est porteur. Wisibilité et lisibilité sont les deux critères qui déterminent les contraintes de l'espace à mettre en scène.

e) Le sigma des énergies dépensées pour mettre en oeuvre cette forme à vocation de type "avenir-publicité" est en effet l'addition de toutes les dépenses en énergie qui ont été déployées par les participants actifs (et très peu par les passifs) depuis le début de l'implantation de cet homme de paille, y compris les travaux agricoles antérieurs qui - à priori - ne lui étaient pas expressément destinés.


Ces formes repérables influencent les comportements des hommes qui ont besoin d'un tel support d'information ainsi que ceux des hommes qui reçoivent ladite information. On peut donc les appeler "mèmes" et certaines formes ayant même vocation entrent en conflit ou en rivalité avec d'autres procédés de "faire-savoir" qui auraient les mêmes objectifs.
On peut bien sûr analyser l'attrait et l'impact particuliers de ces hommes de paille, mais c'est une autre histoire !



  
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commentaires

L
J'attendais depuis un moment des choses plus consistantes du côté de la mémétiqueje vois avec plaisir qu'elles viennentmerci Jean Pierre pour ces éclairagesLa propagation des mèmes n'a jamais eu plus besoin d'une théoriepermettant éventuellement de vacciner les Nombreux contre des formes particulièrement nocives.
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M
Je crois que la liste de diffusion memetique@yahoo groups est en train d'évoluer un peu , de secouer son cocotier en ce moment grâce notamment à un jeune homme qui s'appelle Sylvain MAGNE. Lis ce qu'il écrit Luc, tu verras !Ce sont les anciens qui ronronnent. Pas moi, je te le concède. Je suis entièrement d'accord avec toi : il faut vacciner les Nombreux contre les formes les plus vicieuses de mèmes que lancent les "gros malins" sur le marché.
V
Ton article me plait car il m'explique enfin d'une manière claire ce qu'est un meme.Et l'analyse que tu fais de ces bonhommes est tout à fait pertinente puisque chez nous aussi on en rencontre qui portent d'ailleurs le plus souvent des infos à caractère revendicatif. C'est-à-dire qu'ils revendiquent à la fois leur appartenance à la ruralité, leur souci que la ruralité demeure ce qu'elle fut, sans être parasitée ( par exemple chez nous) par la traversée de voies rapides ou ces mono cultures qui bouffent tout, eau et paysage.Je les trouverais assez sympa si leur paille n'était dévorée de papier qu'on laisse ensuite s'envoler au vent ou pourrir sur place et regrette cette appropriation par la communication d'un personnage qui enchantait mon enfance pour ses vertus un peu... magiques (oiseaux noirs posées sur ses bras en fourches, chapeau de travers, pipe dans la bouche etc...
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M
Ce mème du bonhomme de paille se duplique bien dans nos campagnes. C'est un mème rural par excellence. Il est très loin d'avoir la fonction d'un épouvantail de paille qui, lui, simule la présence d'un homme là où il y a des légumes, des semis et fait peur aux oiseaux... Enfin en principe ! (°!*)Les questions sont pourquoi une telle forme se reproduit si bien et comment le code de cette forme est-il véhiculé un peu partout en même temps. Qu'est-ce qui fait que les esprits, les cerveaux de nos paysans sont prêts, sont prompts à utiliser ce médium pour dire aux automobilistes ce qu'ils ont à leur faire savoir ?